CIV. 1

COUR DE CASSATION
                                           

Audience publique du 5 décembre 1995

M. LEMONTEY, président

Pourvoi n° V 94-11.135

L. G.

 

 

Rejet

Arrêt n° 1881 P sur la
première branche

 

REPUBLIQUE FRANCAISE
                                        

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
                                       

 

                LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

              Sur le pourvoi formé par la société France Télécom, prise en son agence commerciale, dont le siège est 13 bis, place Jules Ferry, 69006 Lyon,

en cassation d'un jugement rendu le 14 décembre 1993 par le tribunal de commerce de Lyon, au profit de M. R. A., demeurant XX, rue des Yyyyy, 69001 Lyon,

défendeur à la cassation ;

              La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

              LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 24 octobre 1995, où étaient présents : M. Lemontey, président, M. Ancel, conseiller rapporteur, M. Grégoire, conseiller, M. Gaunet, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;

              Sur le rapport de M. le conseiller Ancel, les observations de la SCP Monod, avocat de la société France Télécom, les conclusions de M. Gaunet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

              Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

              Attendu que France Télécom fait grief au jugement attaqué (tribunal de commerce de Lyon, 14 décembre 1993) d'avoir prononcé la résolution de la vente d'un appareil de téléphone portatif à M. A., pour vice rédhibitoire, sans relever que l'action avait été intentée dans le bref délai de l'article 1648 du Code civil, ni préciser en quoi consistait le vice inhérent à la chose vendue, enfin en appuyant sa décision sur un motif inopérant relevant la disproportion entre le coût de l'abonnement et celui des communications ;

              Mais attendu, d'abord, que France Télécom n'est pas recevable à invoquer pour la première fois devant la Cour de Cassation la fin de non-recevoir, qui n'est pas d'ordre public, fondée sur l'expiration du bref délai prescrit par l'article 1648 du Code civil ;

              Attendu, ensuite, que le Tribunal a retenu que France Télécom avait reconnu les défectuosités de l'appareil, des "zones d'ombre" pouvant subsister dans son utilisation, difficultés d'utilisation confirmées par un constat d'huissier de justice ; que, par ces énonciations souveraines, le Tribunal a légalement justifié sa décision, indépendamment des motifs surabondants critiqués par la troisième branche du moyen ;

              PAR CES MOTIFS :

              REJETTE le pourvoi ;

              Condamne la société France Télécom, envers M. A., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;

              Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du cinq décembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.


 

Moyen produit par la SCP Monod, avocat aux Conseils pour la société France Télécom

MOYEN ANNEXE à l'arrêt n° 1881 (CIV.1)

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la résolution de la vente et d'avoir condamné FRANCE TELECOM à des dommages intérêts envers l'acheteur

AUX MOTIFS QUE la société FRANCE TELECOM par courrier du 1er juin 1993 a reconnu les insuffisances de sa fourniture ; qu'il est précisé que l'appareil est destiné plus particulièrement à une utilisation à l'extérieur des locaux et qu'il est possible que des zones d'ombres subsistent lors de cette utilisation à l'extérieur ; que les articles de presse régulièrement, produits aux débats indiquent des problèmes de communication dans les zones d'activités de Monsieur A., ce que la société FRANCE TELECOM ne pouvait ignorer ; que, de plus le constat d'huissier démontre que les difficultés ne sont pas limitées à une zone géographique ; que l'observation des facturations émises par la société FRANCE TELECOM démontre une disproportion très importante entre les coûts fixés (abonnement) et les coûts variables (communications) que cette disproportion conduit à un prix de revient réel de la communication aberrant ; qu'ainsi l'on peut estimer que l'économie du marché n'a pas été respectée qu'il résulte des faits ci-dessus exposés que le Tribunal y trouve des éléments complémentaires démontrant l'existence d'un vice caché ; qu'en ce qui concerne les problèmes liés à l'appareil lui-même, l'attitude de la société FRANCE TELECOM rejetant sur son fournisseur MOTOROLA toutes ses responsabilités n'est pas acceptable et qu'il appartient à la société FRANCE TELECOM, si bon lui semble, de se retourner contre son fournisseur qu'il résulte de ces éléments que l'appareil vendu par FRANCE TELECOM à monsieur A. est atteint de vices rédhibitoires et que le Tribunal prononce la résolution de la vente intervenue lé 4 mars 1993."

ALORS QUE D'UNE PART, le jugement qui a prononcé la résolution de la vente pour vice caché sans constater que l'action avait été intentée à bref délai manque de base légale au regard de l'article 1648 du Code civil

ALORS QUE D'AUTRE PART, l'arrêt qui, par des motifs d'ordre général, ne retient que des "insuffisances" et des "difficultés" consistant en des zones d'ombres sans même prendre en considération ni même indiquer l'usage particulier auquel était destiné l'appareil vendu et qui, ainsi, n'a caractérisé aucun vice particulier inhérent à la chose vendue la rendant impropre à l'usage auquel elle était destinée manque de base légale au regard des articles 1641 et suivants du Code civil.

ALORS QU'ENFIN, l'arrêt qui a retenu comme constitutive d'un vice caché par un motif. indivisible de ses autres motifs la disproportion entre le coût de l'abonnement et le coût des communications pour en déduire que l'économie du marché n'avait pas été respectée à méconnu la notion de vice caché lequel ne saurait, à l'évidence, résulter de l'appréciation de l'équilibre financier du contrat de vente mais doit être inhérent à la chose elle-même ; qu'ainsi le jugement a violé les articles 1641 et suivants du Code civil.

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