TRIBUNAL D'INSTANCE DE BORDEAUX

4, rue du Maréchal Joffre
33077 BORDEAUX CEDEX

DÉCLARATION AU GREFFE

 

Demandeur :

Nicolas BRÉMONT

33200 BORDEAUX

Défendeur :

BOUYGUES TELECOM prise en la personne de son représentant légal et à l’adresse de son SAV
29, rue Porte Dijeaux
33000 BORDEAUX

 

LES FAITS

Le 12 avril 2003, Monsieur Nicolas BRÉMONT accepte une proposition de BOUYGUES TELECOM, son opérateur de téléphonie mobile, de remplacer son téléphone mobile moyennant le paiement de la somme de 50 €, le réengagement sur 24 mois et le débit des 3700 points de fidélité accumulés sur son compte ;

Le téléphone mobile acquis à cette occasion est de marque SAGEM modèle MYX5 ACIER et il bénéficie d’une garantie contractuelle de 1 année ;

Le 3 décembre 2003, le téléphone n’acceptant plus d’être chargé, Monsieur BRÉMONT le porte au SAV BOUYGUES TELECOM, lieu de son achat, pour y faire valoir la garantie contractuelle ;

Il lui est remis un bulletin d’intervention portant les mentions : “ état de l’appareil : usage ” et “ description : pb de charge, panne constante ” ;

Aucun appareil de prêt ne lui est proposé pour qu’il puisse continuer à passer et recevoir des appels alors qu’il devra payer son forfait mensuel ;

Le 13 décembre 2003, Monsieur BRÉMONT reçoit un courrier de BOUYGUES TELECOM qui, au lieu de confier le téléphone mobile au fabricant pour réparation, l’a examiné dans ses propres ateliers ;

Et a constaté : que la carte logique est oxydée et “ que l’appareil doit être passé hors garantie pour utilisation non conforme ” !

Un devis de 109,13€ (soit 715, 85 francs !) est soumis à la signature de Monsieur BRÉMONT ;

Monsieur BRÉMONT alerte immédiatement le service clients de BOUYGUES TELECOM pour réclamer le bénéfice des dispositions de la garantie contractuelle ;

Il lui est indiqué qu’il ne sera pas fait droit à sa demande et “ qu’il doit payer ! ” ;

Dans ces conditions, Monsieur BRÉMONT n’a d’autres solutions que d’appeler BOUYGUES TELECOM devant le Tribunal de céans pour la voir condamner à respecter les dispositions du contrat de vente ;

 

DISCUSSION

 

Tout contrat de vente, qu'il ait lieu entre des particuliers ou un professionnel et un consommateur, est soumis à la garantie contre les vices cachés et à la garantie contractuelle du fabricant ;

Les dispositions de la garantie contractuelle (art. L.211-2 du Code de la consommation) ne sont pas exclusives du bénéfice, au profit de l’acheteur, de la garantie légale pour défaut de vices cachés, la dite garantie s’appliquant dans les conditions des articles 1641 et suivants du Code civil (art. L.211-1 du Code de la consommation) ;

La garantie légale, prévue par les articles 1641 et suivants du Code civil, a pour objet de protéger l’acheteur contre les vices cachés dont pourrait être affecté le bien vendu, neuf ou d’occasion et elle couvre tous les frais entraînés par les vices cachés ;

 

Voilà donc un téléphone mobile dont la durée de vie aura été de moins de 7 mois et un vendeur qui refuse d’exécuter ses obligations contractuelles ;

L'article L.211-1 reproduit les articles 1641 à 1648 du Code civil en vertu desquels tout vendeur est tenu envers l'acheteur de livrer une marchandise apte à l'usage auquel elle est destinée et il doit assurer à ce titre la responsabilité des défauts ou vices cachés l'affectant ;

La garantie légale est acquise à tout acheteur :

que le vendeur soit un professionnel ou un particulier ;

que le bien acheté soit neuf ou d'occasion ;

même si il existe une garantie conventionnelle offerte par le vendeur ;

même si les conditions générales afférentes au contrat de vente l'excluent ou la réduisent (ce qui est interdit : décret n° 78-464 du 24 mars 1978, J.O. du 1er avril, voir article L.211-2) ;

même à défaut du paiement par l'acheteur de la totalité du prix à payer ;

indépendamment ou non de la remise d'un bon de garantie ;

aussi bien contre le vendeur que contre l'un quelconque des vendeurs successifs le cas échéant, et ce, jusqu'au fabricant (Cass. Civ., 1re, 5 janvier 1972) ;

 

La garantie légale n'est due qu'à quatre conditions cumulatives :

que le défaut affectant la marchandise soit grave ou rédhibitoire à tel point que l'acheteur ne l'aurait pas achetée ou en aurait offert un prix moindre s'il l'avait connu ou que le vice en cause rende la chose vendue impropre à l'usage auquel on la destine (art. 1641 du Code civil) ;

que le défaut affectant la marchandise soit caché, c'est-à-dire qu'il ne pouvait être décelé lors de la vente (art. 1642 du Code civil) ;

que le défaut affectant la marchandise soit antérieur à la vente ;

que l'action en garantie contre le vendeur (ou le fabricant ou le constructeur) soit intentée dans un bref délai par l'acheteur (art. 1648 du Code civil) ;

 

Indépendamment du fait que Monsieur BRÉMONT bénéficie des dispositions de la garantie contractuelle, il remplit par ailleurs les conditions pour bénéficier de la garantie des vices cachés ;

L’oxydation de la carte logique d’un téléphone portable ne peut être imputée à la responsabilité de Monsieur BRÉMONT et doit être considérée comme un vice caché !

 

En cas de vice caché répondant aux conditions précitées, l'acheteur bénéficie de deux possibilités (art. 1644 du Code civil) ;

soit rendre le bien acheté au vendeur et se faire rembourser l'intégralité des sommes versées (action rédhibitoire) et dans la pratique, il est courant que le vendeur professionnel propose de procéder à l'échange de l'article défectueux contre un article neuf ;

soit garder le bien acheté et se faire indemniser par le vendeur d'une partie du prix en proportion de la perte de valeur qu'occasionne le vice caché (action estimatoire) ;

Dans les deux cas, le vendeur est tenu :

au versement de dommages et intérêts à l'acheteur s'il connaissait les vices de la chose vendue (art. 1645 du Code civil), c'est-à-dire s'il était de mauvaise foi ;

au remboursement à l'acheteur des frais occasionnés par la vente (remboursement des pièces et de la main d'œuvre, des dégâts provoqués par le défaut, frais de transport éventuels...) s'il ignorait les vices de la chose vendue (art. 1646 du Code civil), c'est-à-dire s'il était de bonne foi ;

Il convient de noter que l'œuvre jurisprudentielle a amélioré la protection des consommateurs sur ce point puisque les tribunaux présument le vendeur professionnel comme un vendeur de mauvaise foi (Cass. Civ., 3e, 22 janvier 1974, D.1974, 288) ;

 

Monsieur BRÉMONT a exposé les dispositions de la loi auprès du service clients de BOUYGUES TELECOM qui a refusé de l’entendre et lui a proposé d’intenter une action devant le Tribunal d’Instance ;

Et a refusé de dire de quelle utilisation non conforme est coupable Monsieur BRÉMONT ?!

Par ailleurs, le vendeur se présentant comme seul expert dans cette affaire, à la fois juge et partie, il conviendra de n’accorder aucune valeur probante à la “ soi-disant expertise ” qui pourra être versée par celui-ci aux débats ;

Si le Tribunal ne s’estime pas suffisamment informé, il ordonnera en tant que besoin une expertise aux frais de BOUYGUES TELECOM et désignera un expert judiciaire ;

 

BOUYGUES TELECOM croit judicieux de “ taxer ” ses clients en leur faisant payer des réparations qui doivent légalement être prises en charge au titre de la garantie contractuelle ou le cas échéant, au titre de la garantie légale des vices cachés ;

Elle ne respecte pas les dispositions de garantie versées par SAGEM au contrat de vente et s’arroge un droit exorbitant, celui de tromper son client ;

 

Les dispositions de l’article 1382 du Code civil disposent que “ tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer ” ;

L’article 1382 s’applique, par la généralité de ses termes, aussi bien au dommage moral qu’au dommage matériel ;

BOUYGUES TELECOM sera condamnée à dédommager Monsieur BRÉMONT des préjudices personnels qu’elle lui cause ;

En conséquence, le Tribunal interrogera BOUYGUES TELECOM, alors qu’elle a proposé un contrat d’abonnement de 24 mois à son client et lui a fait faire l’acquisition d’un téléphone mobile, sur les raisons qui la poussent à ne pas respecter le dit contrat en lui imposant de payer la somme de 109,13 euros qui n’est ni fondée ni justifiée puisque le téléphone mobile litigieux bénéfice des dispositions des dispositions de garantie tant contractuelle que légale ;

Il retiendra que BOUYGUES TELECOM ne respecte pas son engagement d’offrir le prêt immédiat et gratuit d’un téléphone mobile pendant la durée de la réparation et dira qu’il s’agit d’une publicité trompeuse ;

Le Tribunal considérera que les dispositions relatives aux conditions de garantie (art. L.211-1 et 2 du Code de la consommation) sont applicables en l’espèce et qu’il appartient à BOUYGUES TELECOM de les respecter en accordant le bénéfice de la garantie contractuelle à Monsieur BRÉMONT ;

Il ordonnera à BOUYGUES TELECOM de procéder à un échange standard du téléphone mobile SAGEM MYX5 ACIER (ou à restituer à Monsieur BRÉMONT son mobile en parfait état de fonctionnement) ;

Le Tribunal considérera l’attitude de BOUYGUES TELECOM comme particulièrement fautive et maligne, et en tant que besoin, il ordonnera une expertise du téléphone mobile et désignera un expert judiciaire aux frais de BOUYGUES TELECOM ;

Il jugera que les faits exposés sont la cause de préjudices moral et personnel importants qui justifie d’octroyer à Monsieur BRÉMONT une indemnité de 1200 euros ;

Le Tribunal dira qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur BRÉMONT les frais exposés pour sa défense et lui accordera une indemnité de 650 euros sur le fondement de l’article 700 du NCPC.

 

BORDEREAU DE PIÈCES

 

Facture du 12 avril 2003 ;
Bulletin d’intervention du 3 décembre 2003 ;
Devis du 9 décembre 2003 ;
Lettre à BOUYGUES TELECOM du 13 décembre 2003 ;
Email à SAGEM MOBILES du 13 décembre 2003 ;
Page d’accueil SAV site internet BOUYGUES TELECOM ;
Dispositions de garantie SAGEM

PAR CES MOTIFS, PLAISE AU TRIBUNAL DE

Dire Monsieur Nicolas BRÉMONT recevable et fondé en toutes ses demandes ;

Dire que BOUYGUES TELECOM se livre à une publicité trompeuse ;

Condamner BOUYGUES TELECOM à procéder à l’échange standard du téléphone mobile SAGEM MYX5 ACIER litigieux ;

Ordonner en tant que besoin une expertise du téléphone mobile de Monsieur BRÉMONT et désigner un expert judiciaire aux frais de BOUYGUES TELECOM ;

Condamner BOUYGUES TELECOM à payer à Monsieur BRÉMONT la somme de 1200 euros à titre de dommages et intérêts et la somme de 650 euros au titre des dispositions de l'article 700 du NCPC ;

Condamner BOUYGUES TELECOM aux entiers dépens de l'instance.

Sous toutes réserves ;
Et ce sera Justice.

 

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