TRIBUNAL D'INSTANCE DE BETHUNE
22, rue d'Aire
BP 808
62408 BETHUNE CEDEX

tel: 03.21.63.14.30

 

RG N° 11-05-001016

Minute : 06/00339

 

JUGEMENT

 

Du : 4 mai 2006

ORANGE FRANCE

C/

V

 

 

JUGEMENT


 

A l'audience publique du Tribunal d'Instance tenue le 4 mai 2006 ;

Sous la Présidence de LASSERRE-BENHAMOU,
Juge au Tribunal de Grande Instance de BETHUNE déléguée
dans les fonctions de Juge d'Instance
assisté (e) de Marylène BAILLOEUIL
faisant fonctions de Greffier audit Tribunal.

Après débats à l'audience du 23 mars 2006

Les parties ayant été avisées de ce que le jugement serait prononcé le 27 avril 2006. A cette date, le délibéré a été prorogé au 4 mai 2006.

Et ce jour, vidant son délibéré, le jugement suivant a été rendu.

ENTRE:

DEMANDEUR(S) :

S.A. ORANGE FRANCE
41-45 Boulevard Romain Rolland, 92120 MONTROUGE,
représenté(e) par Me PAUPER, avocat au barreau d'ESSONNE

ET:

DEFENDEUR(S)

Monsieur V
X, Rue de Y, 62xyz ,
représenté(e) par Me COLPAERT Jean-Pierre, avocat au barreau de BETHUNE

 

EXPOSE DU LITIGE

Par acte en date du 11 mars 2003, la Société ORANGE France a fait assigner devant le Tribunal d'instance de Lens, Monsieur V aux fins de le voir notamment condamner sur le fondement de l'article 1134 du Code Civil à lui payer la somme de 3 168,99 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2002, outre la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par jugement réputé contradictoire en date du 13 novembre 2003, le tribunal d'instance de Lens a

- déclaré prescrite l'action en paiement de la Société ORANGE France concernant les factures courant du 21 mai 2001 au 21 février 2002,
- débouté la Société ORANGE France de sa demande au titre de l'indemnité de résiliation et de sa demande au titre des frais irrépétibles,
-condamné la Société ORANGE France aux entiers dépens.

Par arrêt en date du 27 septembre 2005, la 1ère Chambre Civile de la Cour de Cassation a cassé et annulé, mais seulement en sa disposition déclarant prescrite l'action en paiement du prix des communications téléphoniques litigieuses, le jugement rendu le 13 novembre 2003, entre les parties par le tribunal d'instance de Lens et a remis la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement en les renvoyant devant le tribunal d'instance de Béthune.

L'affaire a été appelée à l'audience du 15 décembre 2005 et a été renvoyée pour être en état d'être plaidée le 23 mars 2006.

A l'audience, la Société ORANGE France a modifié ses demandes sollicitant la condamnation de Monsieur V à lui payer la somme de 1605,73 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 juillet 2002. Par ailleurs, elle a demandé que la capitalisation des intérêts soit ordonnée et qu'une somme de 1500 euros lui soit allouée sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Elle a fait valoir que Monsieur V a souscrit le 9 mars 1999 à titre personnel auprès de la Société France TELECOM MOBILES devenue par la suite ORANGE France, un contrat d'abonnement itinéris ; qu'il réglait ses factures régulièrement jusqu'au mois d'avril 2001 ; qu'elle a procédé à la résiliation du contrat le 1er mars 2002 conformément aux conditions générales d'abonnement ; qu'une mise en demeure lui a été adressée le 16 juillet 2002 présentée le 18 juillet 2002 ; qu'aucun règlement n'est intervenu ; que la requête en injonction de payer présentée au président du tribunal d'instance a été rejetée au motif de la nécessité d'un débat contradictoire ; que l'article L 32. 3.2 du Code des Postes et Télécommunications est inscrit dans la loi du 15 novembre 2001 et ne peut donc s'appliquer aux factures antérieures à cette loi ; que l'article L 126 du Code des Postes et Télécommunications ne visait que l'exploitant public (France Telecom ) et ne lui est donc pas opposable ; que ce délai d'un an est une courte prescription fondée sur une présomption de paiement, prescription qui peut être interrompue par un acte du créancier qui réclame son dû en l'espèce une mise en demeure.

Monsieur V a demandé que la Société ORANGE France soit déboutée de ses demandes aux motifs que l'action de cette dernière serait prescrite et qu'elle soit condamnée à lui payer la somme de 460 euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Il a rappelé que les factures dont il est sollicité le paiement s'étendent de la période du 21 mai 2001 au 21 février 2002 ; que l'assignation est du 11 mars 2003 et qu'en application de l'article L 32-3-2 la prescription est acquise.

L'affaire a été mise en délibéré pour être rendue le 27 avril 2006, délibéré prorogé au 4 mai 2006.

MOTIVATION

En application de l'article 122 du Nouveau Code de Procédure Civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix et la chose jugée.

L'article L 126 du Code des Postes et Télécommunications applicable avant la loi du 15 novembre 2001 vise le seul exploitant public ; il n'existe donc pas de prescription acquisitive au profit de l'usager à l'encontre des opérateurs privés avant la loi du 15 novembre 2001.

Cependant en application de l'article L 32-3-2 devenu l'article 11 du Code des Postes et communications électroniques, la prescription est acquise, au profit de l'utilisateur, pour les sommes dues en paiement des prestations du prestataire du service universel et des titulaires de l'autorisation prévue à l'article L3 lorsque ceux-ci ne les ont pas réclamées dans un délai d'un an à compter de leur date d'exigibilité.

Par ailleurs, l'article 2244 du Code Civil dispose qu'une citation en justice, même en référé, un commandement ou une saisie, signifiés à celui qu'on veut empêcher de prescrire, interrompent la prescription ainsi que les délais pour agir.

Aucune disposition des conditions générales de l'abonnement LOFT ne fait état de l'acceptation par l'usager d'un autre mode interruptif de prescription que ceux prévus à l'article 2244 du Code Civil. En tout état de cause, la demanderesse ne produit aucun document signé par Monsieur V autre que les conditions particulières d'abonnement en date du 9 mars 1999.

Dès lors la simple mise en demeure de payer adressée par lettre recommandée ou la présentation d'une requête en injonction de payer qui est rejetée par le président du Tribunal d'instance ne sont pas des actes interruptifs de prescription au sens de l'article 2244 du Code Civil.

En conséquence, il convient de déclarer prescrites les sommes réclamées par la SA ORANGE France laquelle bénéficiait

- pour les créances antérieures au 23 octobre 2001 d'un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 15 novembre 2001 pour les recouvrer,
- pour les créances postérieures d'un an à compter de la date d'exigibilité des factures pour en solliciter le règlement judiciairement.

En effet, le seul acte qui aurait pu interrompre la prescription est l'acte d'assignation devant le tribunal d'instance. Cependant dans la mesure où cet acte a été établi le 11 mars 2003, il est tardif, la dernière facture étant en date du 21 février 2002.

Dès lors, la SA ORANGE France est irrecevable en sa demande.

Il est équitable compte tenu de la solution du litige que chacune des parties supporte la charge des frais irrépétibles engagés par elle dans le cadre de la présente procédure.

La SA ORANGE France étant partie perdante, il y a lieu de la condamner aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant par jugement mis à disposition au greffe, contradictoirement et en premier ressort,

- Constate la prescription de l'action engagée par la SA ORANGE France à l'encontre de Monsieur V,

- Déclare en conséquence irrecevable l'action en paiement engagée par la SA ORANGE France à l'encontre de Monsieur V,

- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- Condamne la SA ORANGE France aux entiers dépens de la procédure.

Ainsi jugé le jour, mois et an susdits.

 

LA GREFFIERE
(signé)
LA PRESIDENTE
(signé)

 

haut de la page | accueil | jugement avant cassation | version graphique